Actualités / Société - mercredi 21 janvier 2015

Comment éviter le désert médical ?

“C’EST UNE QUESTION qui nous préoccupe”, avoue la députée-maire Hélène Geoffroy. Les déserts médicaux ne sont plus l’apanage des zones rurales. De plus en plus de villes populaires, à l’instar de Vaulx-en-Velin, se trouvent tout aussi démunies que les campagnes françaises. La Creuse et l’Est lyonnais, même combat : difficile de faire venir des professionnels pour s’y installer.

La situation est d’autant plus préoccupante que nombreux sont les médecins vaudais approchant de l’âge de la retraite. La moitié des 33 généralistes libéraux exerçant sur la commune risque de ne plus être en fonction dans dix ans. “Que va-t-il arriver dans quelques années, quand nous allons tous prétendre à la retraite ?”, s’interroge Jacques Laroque, installé à Vaulx depuis 1980. Le problème se pose déjà pour ce qui est des médecins spécialistes, trop peu nombreux. “On manque de tout à Vaulx-en-Velin. De gynécologues, d’ophtalmologues, de cardiologues, de rhumatologues, de psychiatres..., estime Yves Cartailhac, médecin au Sud où la désertification se fait particulièrement ressentir. Les médecins préfèrent souvent s’installer dans des zones où ils savent qu’ils gagneront très bien leur vie. Les zones moins côtés,comme ici, sont délaissées”.

“Ne pas dramatiser la situation”

Sur près de 164 professionnels vau- dais libéraux, on recense à peine 14 spécialistes. “Et encore, un des deux ophtalmologues est en train de partir”, souligne le docteur Roger Bolliet, membre du comité directeur du syndicat MG France, majoritaire chez les généralistes. Evidemment, dans l’agglomération lyonnaise, toutes ces spécialités sont bien représentées, mais une question de mobilité se pose. Aller voir un cardiologue sur la pres- qu’île entraîne des déplacements et tous les patients ne peuvent pas forcement y faire face. “Si on a des transports en commun valables, ce n’est pas un problème”, note ce dernier, faisant réfé- rence à l’absence de tramway ou de métro dans le centre-ville.

“Faut-il avoir toute la gamme de spécialistes ? Probablement non, mais au vu des pathologies recensées dans la ville, il y a clairement des manques”, estime Yvan Margue, conseiller municipal délégué à la Santé, pointant la sous- représentation des spécialistes de la santé mentale. “Il ne faut cependant pas dramatiser la situation, car nous avons en France une médecine de qualité, reprend-il. Il faut veiller toutefois à mieux l’organiser et une meilleure répartition des médecins devrait être une priorité.”

Les raisons d’une désertification

Car un malaise persiste chez les professionnels quant à la surconsommation médicale, le rythme de travail et le manque de coordination. “Les médecins reçoivent moins qu’ailleurs sur rendez-vous et sont plus nombreux en exercice isolé”, assure le docteur Bolliet. Certains avancent que favoriser l’installation collective, la concertation et la mutualisation des moyens seraient une solution pour palier au problème. “L’idée d’une Maison de la Santé revient aussi et nous l’examinons avec attention. Il faut être innovant dans ce qu’on propose pour qu’une nouvelle génération s’installe”, lance Hélène Geoffroy, qui après avoir reçu les médecins de la commune cet automne, va rencontrer les représen- tants de l’Agence régionale de Santé dans les semaines à venir, afin de leur présenter certaines préconisations. “La Municipalité est prête à des partici- pations si elles sont efficaces. Il s’agit avant tout de faire revenir le droit com- mun dans les banlieues, celui de la santé notamment.” Et l’élu à la Santé de conclure : “Il y aura assez de médecins à Vaulx-en-Velin si on arrive à faire d’elle une ville attractive. Il faut en finir avec le fantasme de la ville de banlieue.”

Maxence Knepper

(1) : Desserte médicale selon l’étude sur la démo- graphie des médecins généralistes établie par l’union régionale des professionnels de Santé – médecins de Rhône-Alpes, datée de septembre 2012.

 

 

La loi Santé

Prévention et meilleur accès aux soins sont au coeur du projet de loi santé présenté par la ministre des Affaires sociales Marisol Touraine, et dont Hélène Geoffroy est l’une des rapporteurs. “S’impliquer sur une telle loi me permet d’apporter l’expertise des spécificités de la banlieue”, affirme la députée-maire. Quatre grands axes composent la charpente de ce texte : la prévention, la mise en place d'un service territorial de santé, l'innovation et une nouvelle gouvernance de la politique de santé. Le développement du tiers payant, ce dispositif permettant d’éviter l’avance des frais médicaux, est notamment préconisé, et la place des usagers dans le système de santé doit être renforcée.

Une loi qui fait débat chez les médecins sans toutefois provoquer un rejet net. “Nous sommes plutôt favorables au tiers payant que nous pratiquons d’ailleurs beaucoup à Vaulx-en-Velin, à condition qu’il soit sécurisé et simple, assure Roger Bolliet du syndicat MG France. On aimerait que puissent continuer à coexister la médecine libérale et le secteur public. Les professionnels de terrain ont besoin d’autonomie, de confiance et de responsabilité”.

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