Actualités / Société - jeudi 19 juin 2014

La solitude des seniors, un fléau à combattre

QUELQUES MOTS échangés, un café partagé, un sourire, un regard. Ce vendredi, Patricia, bénévole des Petits frères des pauvres, se rend chez Elisabeth qui vit seule avec son chat dans les hauts immeubles du chemin des Vergers. “Je ne suis pas une vieille radoteuse. Je suis capable d’amuser un régiment avec mon caractère, assure dans un éclat de rire celle qui a fêté ses 99 ans en avril. Mais à mon âge, on n’est plus comme on était. Je rumine quand je suis seule. Je ne connais même pas mes voisins.” Et pourtant, elle habite Vaulx depuis plus de 50 ans.

Elisabeth ne veut pas aller en maison de retraite. A choisir, elle préfèrerait “être placée dans une crèche ou un chenil”. Une fois par semaine, cette rencontre la sort de sa monotonie, même si son amie Mauricette la visite quotidiennement. Ensemble, Elisabeth et Patricia se remémorent les nombreuses vies de la presque-centenaire, discutent du présent et chassent les idées noires. Le vendredi suivant, elles iront certainement partager le repas hebdomadaire que les Petits frères proposent à l’espace Frachon, avant de se dégourdir les jambes au Grand parc. Du moins, si son ascenseur fonctionne : depuis quelques jours, la nonagénaire est coincée chez elle, faute de pouvoir descendre ses cinq étages.

Un phénomène croissant

“Il est très difficile de connaître les personnes isolées qui, de fait, sont souvent peu visibles. Surtout celles qui ont empêchées physiquement”, note Séverine Bernard, directrice du service municipal des Retraités.
En 2013, près d’une personne âgée sur quatre souffraient de solitude (24 %) alors qu’elles n’étaient que 16 % en 2010(1). Un phénomène croissant, lié à l’augmentation de l’espérance de vie, à la hausse du nombre de seniors en perte d’autonomie et à l’étiolement des relations familiales. “La proximité est une notion primordiale dans notre action, estime Eric Foucart, responsable de l’antenne vaudaise des Petits frères des pauvres. Nos 25 bénévoles sont organisés en équipes de proximité et travaillent avec les associations de quartiers afin de mettre en place une solidarité de voisinage. Au total, nous accompagnons une cinquantaine de personnes isolées, tous précaires et pas forcement très âgées.”

Tous les jeudis en fin d’après-midi, Agnès, Johanna et Julie s’installent dans la salle commune du foyer Adoma, au Mas du Taureau. “Les pensionnaires savent qu’ils peuvent nous trouver ici. Ils passent pour jouer aux dominos, boire quelque-chose ou simplement discuter. Ce sont des gens qui ont des choses à raconter mais qui n’ont personne”, soulignent-t-elles.

Pour ajouter encore un peu de soleil à des quotidiens qui en manquent, les bénévoles emmènent fréquemment les personnes âgées en vacances. Dernièrement, c’est à Sainte-Maxime, dans le Var, qu’ils ont posé leurs valises. Un séjour qui en a réjoui plus d’un : “Ça faisait tellement longtemps que nous n’étions pas partis”, disent de concert, Colette, 51 ans, Jeannine, 74 ans, et Daniel, 73 ans.

Afin de lutter contre l’isolement accru en période estivale, la ville de Vaulx-en-Velin et les Petits frères des pauvres renforcent le rythme de la Pause café par un accueil tous les jeudis à la salle Edith-Piaf. Ce moment convivial est accessible à toute personne âgée domiciliée sur la commune.

Redonner l’envie de prendre soin de soi

Fatima Kalkoul et Zakia Okba ont-elles aussi décidé d’agir contre l’isolement des personnes âgées. “Dès la rentrée, l’association Partagez un moment pro- posera des ateliers pour rompre la solitude, notamment des séances bien-être, relate Zakia Okba, présidente de la structure basée à l’espace Carco. Nous avons constaté que beaucoup de seniors n’ont plus à cœur de prendre soin d’eux et nous voulons leur redonner cette envie”. L’association souhaite faire de ces ateliers, des rencontres intergénérationnelles. “Les plus jeunes ont beaucoup à apprendre des aînés, et vice-versa. Cette transmission a de plus en plus tendance à se perdre”, ajoute Fatima Kalkoul.

Bien vieillir, c’est vieillir en bonne santé mais aussi en étant bien dans sa tête et en se sentant entouré. Depuis qu’ils fréquentent ces associations, les seniors le disent : ils se sentent mieux. “Ils sont des remèdes à nos problèmes”, affirme Perrine, 60 ans, qui retrouve petit à petit le goût de la vie.

Maxence Knepper

(1)Etude nationale 2013 sur la solitude, réalisée par la Fondation de France.

Pratique :

Service municipal des Retraités, 41 avenue Gabriel-Péri. Tél: 04 72 04 78 40.
Les Petits frères des pauvres, espace Frachon, 3 avenue Maurice-Thorez. Tél : 04 78 80 42 55. Email: grandlyon.est@petitsfreres.asso.fr

Partagez un moment, espace Carco, 20 rue Robert-Desnos. Email : partagezunmoment@yahoo.com

Plan canicule pour un été serein

Dans le cadre du plan national canicule, un registre a été mis en place pour recenser les habitants fragiles et isolés. Peuvent s’inscrire, les plus de 65 ans résidant à leur domicile, les plus de 60 ans inaptes au travail et résidant à leur domicile et les personnes adultes handicapées résidant à leur domicile. L’inscription sur le registre canicule de la mairie est volontaire et facultative. Elle peut être réalisée par la personne elle-même ou par un représentant légal, à défaut, un tiers (médecin, service d’aide à domicile, famille, voisin,...).

Renseignements / inscriptions : mairie de Vaulx-en-Velin, service municipal des Retraités, 41 avenue Gabriel-Péri. Tél. 04 72 04 78 40.
Email : service.retraites@mairie-vaulxenvelin.fr

Photo © Marion Parent

 

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