Portraits / JOURNAL N°98 - lundi 01 septembre 2014

Régis Charre, le départ du prêtre bâtisseur

ON NOUS demande de nous attacher aux gens à 200 %, de nous inscrire dans une ville, puis de nous en déta- cher entièrement. C’est la règle, mais c’est un déchirement”, avoue Régis Charre. Arrivé à Vaulx-en-Velin en 2003, le prêtre vient de rejoindre la paroisse de Vénissieux. Régis Charre a un parcours atypique. Après avoir “raté brillamment (son) baccalauréat”, ce gône de la Guille, membre des Jeunesses ouvrières chrétiennes depuis l’âge de 15 ans, devient dessinateur industriel. Il participe à la création d’un syndicat dans son entreprise, avant de tout abandonner pour suivre la voie tracée par le père Chevrier, fondateur de l’Œuvre du Prado à la Guillotière : vivre au plus près des démunis. “Le plus dur a été d’envoyer ma lettre de démission à mon patron, confie-t-il. J’avais des copines, j’aurais pu me marier, avoir des enfants... J’ai renoncé à cette vie, à ma carrière professionnelle, à l’action syndicale et en partie, à l’argent. Il faut une part de folie pour renoncer à ces choses, mais je ne le regrette pas.” Le 25 juin 1989, il est ordonné prêtre. Après trois ans passés à Gerland, il rejoint Saint-Priest, puis Rillieux-la-Pape et, enfin, Vaulx-en-Velin.

Un nouveau souffle

S’il est une date qui marque le ministère vaudais du père Charre, c’est le 2 décembre 2012. En ce jour fut consacrée l’église Saint-Thomas, au centre-ville. Un édifice à l’architecture résolument moderne qu’il a pensé et voulu pour accompagner l’évolution de la cité. “Avant, la vie communale tournait autour du Village, comme la vie paroissiale. Il y a quelques décennies, le cœur de la ville s’est déplacé et nous avons suivi”. Cela faisait 50 ans qu’aucune église n’avait été érigée dans le diocèse. “Ce fut beaucoup de stress, de temps et de sueur, mais ce bâtiment a donné un nouveau souffle à la communauté”, souligne le prêtre de 56 ans. Une communauté riche et diverse, composée d’assyro-chaldéens, d’antillais, d’africains, de tamouls et de familles installés depuis longtemps dans l’Est Lyonnais.

L’autre grande construction de Régis Charre, c’est le dialogue inter-religieux. En 11 ans, il a noué de solides liens avec les communautés israélite, musulmane et protestante. “J’ai commencé mon mandat par une visite de la synagogue, je l’ai terminé par une itinérance en mai, durant laquelle, avec d’autres représentants religieux, nous nous sommes rendus à la synagogue, à l’actuelle mosquée, sur le chantier de la future mosquée et à l’église Saint- Thomas. En quelque sorte, la boucle est bouclée.”

L’hommage de la commune

Le 25 juin dernier, à l’occasion du 25e anniversaire de son ministère et pour le remercier du travail qu’il a mené, la députée-maire Hélène Geoffroy lui a remis la médaille de la ville.

“Le père Régis ne craint pas le débat. Il aime la controverse, souligne-t-elle. Profondément attaché aux valeurs républicaines, il sait ce que la tolérance, le respect, la liberté doivent à la laïcité, et la liberté est le privilège des grands cœurs disait Saint Augustin. Nous avons eu, le père Régis et moi, des discussions sur cette richesse citoyenne que nous devons aux fondateurs de la République et aux initiateurs de la séparation de l’Eglise et de l’Etat”.

Un hommage qui touche particulièrement Régis Charre : “Nous n’avons pas besoin de la gloire éphémère des hommes, mais être reconnu pour son apport au vivre ensemble procure beaucoup d’émotion. Partir sur cette note me donne très envie de poursuivre mon action là où je vais”.

Maxence Knepper

Photo © Marion Parent

C’est avec un gros pincement au cœur et beaucoup d’émotion que Régis Charre a quitté Vaulx-en-Velin le 1er septembre, après onze ans passés dans la paroisse. 

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