Actualités / Société - mardi 20 mai 2014 - (5 images)

Le Super marché aux puces : l’envers du décor

S'IL est un marché dont la notoriété dépasse les limites de Vaulx-en-Velin, c’est bien sûr le Super marché aux puces. une caverne d’Ali Baba sans sésame. Chaque dimanche, entre 15 000 et 25 000 personnes s’y rendent, en quête de bonnes affaires. “J’y vais quasiment toutes les semaines, c’est comme un rituel, assure Yacine, jeune trentenaire du Mas du Taureau. On a tous une histoire particulière avec ce marché où l’on croise forcément des têtes connues.”

Dès la sortie du périphérique, l’histoire se répète de semaine en semaine. Il est à peine 9h, le C3 déverse son lot de familles et déjà, les voitures peinent à avancer. Très vite, les cinq hectares du marché de la rue Tita-Coïs se remplissent tandis que l’air se charge des odeurs de merguez grillées, de galettes farcies, d’olives marinées et de fruits bien mûrs. “C’est vraiment vivant ici, ça me change de mon petit marché de Jean-Macé”, s’étonne Manon, jeune lyonnaise pour qui c’est la première visite au Pont-des-Planches. “Le dimanche, c’est le centre du monde !”, plaisante Larbi, vendeur de produits de beauté. Alain, spécialisé en chaussures pour femme le confirme : “Je fais aussi le marché des Minguettes, mais celui là est de loin le meilleur. Il a une âme.” Même Ahmed Telaïdj n’abandonnerait pour rien au monde le marché, lui qui possède aussi une boucherie à Vaise.

40 ans que cela dure

“Nous avons ouvert nos portes le jour de la mort de Georges Pompidou, en 1974”, se rappelle un exposant. a l’origine, on retrouve quelques puciers chassés de la place Rivière de Villeurbanne et décidés à trouver un petit coin bien à eux. C’est au débouché du pont de Cusset qu’ils dégotent leur bonheur, rejoints par des vendeurs d’alimentation, de produits manufacturés, de vêtements et de pièces automobiles. au fil des années pourtant, la brocante a perdu de son poids face aux autres secteurs. elle ne représente aujourd’hui qu’une infime part des transactions dominicales. “Il ne doit rester que deux ou trois brocanteurs”, note la direction.

Parmi ces irréductibles, Daniel et Josiane Ortolani. “Nous avons pensé à rejoindre les Puces du Canal mais nous n’avons jamais sauté le pas. On préfère rester ici”, confie Josiane. Chez eux, le marché est une histoire de famille : le grand-père était une figure de la place Rivière, le père, un pionnier du Super marché, quant à leurs deux fils, l’un donne un coup de main sur le stand et l’autre s’occupe de l’accueil du site.

“Ce n’est pas une mince affaire à gérer”

Présent au Super marché depuis 1978, Joseph Amsellem est à la tête de l’institution vaudaise depuis deux ans, prenant la suite de Jo Nucci. Le dimanche matin, il abandonne son stand de fruits et légumes pour faire sa tournée. “Ce n’est pas une mince affaire à gérer, consent-il. Il faut régler les problèmes des 350 commerçants, s’assurer du remplissage des parkings, veiller à ce que chacun soit à sa place, que les marchandises vendues soient conformes, que les stands respectent l’alignement...”. C’est qu’ici, les forains ne sont pas que forains : ils sont aussi propriétaires des lieux. au Super marché, les actionnaires, ce sont les commerçants. un modèle d’entreprise unique en France. Afin d’avoir un œil partout, Joseph Amsellem peut compter sur un dispositif bien rodé. Son talkie-walkie toujours en main, il reste en liaison constante avec la douzaine d’agents de sécurité, les six placiers, les sept autres responsables de secteur qui comme lui, arpentent les stands, et le solide réseau de caméras. Pendant que Mounir scrute les écrans de contrôle afin de superviser le remplissage des parkings et de débusquer les voleurs à la sauvette, d’autres patrouillent dans les rues voisines pour veiller à la tranquillité des riverains. Bilal, lui, garde l’entrée principale. il s’assure que la cir- culation reste fluide, son vélo à portée de main au cas où il doive intervenir à l’autre bout du site. “Un agent qui a travaillé au Super marché aux puces, il peut travailler n’importe où après, rigole-t-il. On rencontre des problèmes hors du commun ici ! Mais on finit toujours par arriver à les réguler...”

Une matinée au pas de course

“Bonjour monsieur le président !”, “Comment vas-tu José ?”. Sur son pas- sage, Joseph Amsellem salue ses collègues. “Le plus gros de mon boulot, c’est d’être à leur écoute.” avec toute sa diplomatie, il en profite pour faire quelques rappels au règlement. “Mon souci majeur, c’est d’être sûr que tout soit bien à sa place.”Le sexagénaire circule avec une aisance désarmante dans les allées par coeur. Un crochet par la “cour des miracles”, au milieu des puces et de l’outillage, et par le secteur automobile, mais José n’a guère le temps de s’arrêter. le dimanche, c’est au pas de course qu’il avale les kilomètres, au son du récepteur radio qui n’en fini pas de grésiller pour l’informer d’une chute, d’une dispute entre un commerçant et une cliente ou d’un problème sur un parking. Tous les tracas de la vie d’un marché. Il passe tout de même par les deux buvettes de la cour des miracles où se retrouvent les fidèles, puis par le Café des Puces, lieu de rendez-vous par excellence.

La pendule avance et les clients commencent à déserter les étals pour s’agglutiner, les bras chargés de sacs, aux arrêts de bus. il est 15 heures, les forains remballent leurs marchandises en veillant à ne rien laisser sur le bitume. les agents de nettoyage se mettent à l’œuvre afin d’effacer les stigmates du passage des milliers de chalands, dans l’enceinte comme dans les rues alentours. un dernier tour pour vérifier que tout est nickel et l’équipe du Super marché peut enfin souffler. Du moins jusqu’au dimanche suivant.

Maxence Knepper

Photos © Marion Parent

Pratique : Super marché aux puces, 1 rue Titta-Coïs. Tél. 04 78 80 96 55. 1 rue Titta-Coïs. Tél. 04 78 80 96 55.

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